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Droit à l’image des salariés : Impacts RH et Privacy – Cas d’usage

Cas d’usage

 Une séance photo pour les vœux que l’on envisage d’exploiter pour communiquer auprès de la clientèle, ou la mise en place d’un dispositif de vidéosurveillance sont autant de projets de communication qui doivent être soumis à votre juriste, votre DRH, ou votre Dpo.

Pas d’inquiétude, le projet n’en est pas moins réalisable, mais doit être anticipé.

  • Le code du travail pose le principe du droit du salarié au respect de sa vie privée (article 9 du code civil et article L1121-1 Code du travail)
  • Le contrat de travail contient des dispositions spécifiques aux droits des salariés, et peut inclure des clauses sur le droit à l’image
  • Les mentions d’information du salarié sur la protection de ses données personnelles si elles sont conformes au RGPD (article 13), précisent les usages (« traitements, finalités ») et leur justification juridique (« base légale »), mais aussi leurs destinataires et leur durée de conservation.
Il signe = il accepte  

une autorisation de droit à l’image permettra de collecter le consentement clair de votre salarié,

 

 

 

Il signe = il reconnait avoir été informé  

une notice RGPD, ou une clause RGPD de l’autorisation à l’image, permettra d’informer le salarié aussi précisément que nécessaire, non seulement sur le pourquoi et le comment mais également sur ses droits (à s’opposer, à demander une rectification, une mise à jour, une suppression…)

 

 

 

Les apports de la jurisprudence récente

  • Une jurisprudence récente (*) incite tant les employeurs à respecter le droit à l’image de leurs salariés, à peine de se voir condamner à des dommages et intérêts.

Dans cette affaire, la question de droit relevant du droit à l’image concernait l’utilisation par l’employeur d’image de son salarié, concierge, sans autorisation préalable, pour illustrer une plaquette commerciale de l’entreprise. La cour a jugé que l’atteinte au droit à l’image est préjudiciable en soi, de sorte que cette décision, qui est renvoyée aux juges composant la Chambre sociale de la Cour d’Appel de Versailles, ouvrira droit à la condamnation de droit de l’employeur à dommages et intérêts.

 

  • Autre apport jurisprudentiel récent (**) : Après avoir constaté des anomalies dans les stocks, un employeur avait décidé d’exploiter les images de vidéosurveillance afin d’en identifier les tenants et aboutissants. Le dispositif de vidéosurveillance ne respectait pas les obligations de déclaration administrative,  ni l’information préalable des collaborateurs. Le salarié opposait son droit à l’image, pour écarter ces preuves et ainsi contester le licenciement prononcé.

C’est ici un exercice d’équilibre entre le droit à la preuve de l’employeur et le respect de la vie privée du salarié auquel se livrent les juges.

L’exploitation des données personnelles issues de la vidéosurveillance est jugée admissible, au motif qu’elle était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et strictement proportionnée au but poursuivi, dans un contexte de disparition de stocks que seules les images permettaient d’analyser.

Dans ce cas donc, l’employeur, qui avait pourtant capté puis exploité les images de son salarié sans son autorisation préalable, et sans en avoir respecté le cadre légal (autorisation administrative, information des salariés, affichage), est autorisé à s’en prévaloir à titre probatoire.

L’histoire ne dit pas si le salarié a saisi la CNIL, au titre de l’’exercice de ses droits issus du RGPD, qui eux ne relèvent pas de la jurisprudence civile.

 

Revenons à notre projet de communication au sein de votre entreprise.

  • Si la prise d’image n’a pas encore été réalisée

Votre Juriste / DRH / Dpo procède aux vérifications de la documentation de l’entreprise, et vous établi les actes à soumettre à l’accord des salariés concernés.

Vos collaborateurs sont libres d’accepter ou de refuser.

Ils peuvent également renoncer à leur accord, ultérieurement. Il faudra alors flouter, recadrer ou supprimer l’image concernée.

  • Si la prise d’images a déjà été faite

Vous n’avez pas encore publié les images ? il est encore temps de faire le nécessaire en collectant les autorisations dans les formes.

Vous avez déjà publié ? Assurez vous de l’accord de chacun des collaborateurs concernés :

  • Supprimez, floutez, recadrez les images des collaborateurs qui refusent la publication (et ce sans délai)
  • Collectez les autorisations de tous ceux qui acceptent la publication.

Autant d’autorisations à l’image que de projets de communication

Conservez les autorisations à l’image et soumettez vous à l’exercice de la consultation des collaborateurs à chaque nouveau projet de ce type. Une autorisation ne vaut pas blanc seing pour l’avenir.

Risques et Conséquences

L’entreprise qui procède à une publication sans accord de l’intéressé commet une violation de son droit à l’image, et à sa vie privée. Si un litige prud’homal s’en suit, le manquement et le préjudice qui en est résulté pour le salarié pourront être imputés à l’employeur, et donner lieu à l’allocation de dommages et intérêts.

D’autant que le salarié n’a pas à démontrer son préjudice, il lui suffit de l’invoquer, et d’en demander réparation :

« En cas d’atteinte au droit à l’image, la réparation est automatique, le salarié n’a pas à démontrer de préjudice subi (cass. soc. 19 janvier 2022, n° 20-12420 D). »

Plan d’action

La communication de l’entreprise auprès de sa clientèle, si elle inclut les salariés, a tout intérêt à être le fruit d’un projet auquel ils auront adhéré. Son impact en sera d’autant plus fort.

Respecter les droits des salariés à leur image, est aussi un moyen de les inclure dans le projet de communication.

Ne cloisonnez pas, et partagez vos projets de communication avec vos juriste/ DRH/Dpo.

Voici une infographie représentant un plan d’action que ce projet de communication pourrait susciter pour la Direction communication (Dir Com), la Direction des Ressources Humaines (DRH), le ou la Délégué à la protection des données (Dpo).

 

Fatoumata Brouard, Avocate, Dpo et DRH externe à temps partagé

 

(*) Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, 14 février 2024, n°22-18014

(**) Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, 14 février 2024, n°22-23.073

Pour aller plus loin sur les droits des salariés à la protection de ses données personnelles : https://www.cnil.fr/fr/thematiques/travail-et-donnees-personnelles

 

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